jeudi 18 avril 2013

Les outils disponibles pour la RSE

Le patronat ne veut pas de législation qui rendrait le principe de volontariat, base de la RSE, complètement obsolète. Les associations de consommateurs, les syndicats et les ONG, eux, réclament plus de transparence concernant ce concept. Il existe, bien sûr, des lois nationales, européennes et internationales, auxquelles l’entreprise doit se soumettre. Afin de contenter chacune des parties et pour mettre un terme aux dérives ci-dessus, des normes et labels sont créés.

En terme de labels et de normes, nombreux sont les pays ayant leurs propres certifications, leur propre écolabel ou encore des chartes de comportement. Récemment (fin 2010) les directives de l’ISO 26000 ont permis de donner un cadre aux actions RSE pour les entreprises qui le désirent. Auparavant, les entreprises se référaient, en fonction de leurs actions, tantôt aux accords de Kyoto (pour le volet environnement) tantôt aux règles de l’OIT (pour le volet social) ou encore aux principes de l’OCDE (pour la bonne gouvernance).

La RSE se base sur plusieurs normes et valeurs internationales, elles sont importantes à connaître et à assimiler pour pouvoir partir sur de bonnes bases quand l’entreprise s’implique dans la RSE. Ce chapitre détaillera plus spécifiquement les bases sociales et énumérera les bases des lois sur les deux autres piliers de la RSE.


Le cadre légal

Une entreprise ne peut parler de RSE si elle ne respecte pas les lois du pays dont elle dépend. Ces lois sont aussi diversifiées qu’il existe de pays. Cependant, la plupart de ces lois ont les mêmes bases, détaillées ci-dessous.

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH)
Convention internationale la plus importante et la plus universelle, la convention des droits de l’Homme (incluant les droits de la femme et les droits de l’enfant) est la base sur laquelle toutes les autres conventions s’appuient pour exister. Elle inclut les droits civiques et politiques, sociaux, économiques et culturels et enfin, des droits collectifs. Il s’agit d’une déclaration d’intention morale qui est mondialement reconnue et acceptée. C’est la base du droit international. Les entreprises doivent être attentives au respect de la DUDH dans leur zone d’influence, partout dans le monde.

Les déclarations et conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT)
Les différentes déclarations et conventions de l’OIT qui forment les valeurs et normes internationales en matière de travail sont pour la plupart le développement et la concrétisation des droits énumérés dans la DUDH.
Dans sa Déclaration relative aux principes et droit fondamentaux au travail, l’OIT définit les normes fondamentales les plus importantes au niveau du travail. Cette déclaration regroupe 8 conventions:

Liberté syndicale, négociation collective et relations professionnelles: Soit la liberté que chacun a de s’affilier à un syndicat, de négocier son contrat de façon collective et ne pas avoir de représailles s’il décide de se syndiquer.

Le travail forcé et l’abolition de celui-ci: L’image du travail forcé est directement liée aux travailleurs étrangers qui travaillent des heures durant sans contrepartie. Mais le travail forcé peut se cacher là où personne ne l’attend: une clause dans un contrat de travail qui peut paraître anodine mais qui autorise un patron à déplacer le travailleur à sa convenance dans son entreprise ou encore des heures supplémentaires à charge du travailleur: ni payées, ni récupérées.

Le travail des enfants et l’âge minimum:Le travail des enfants ne concerne pas uniquement les enfants à proprement parler mais tous les mineurs d’âge. Les contrats en apprentissage ou les contrats d’étudiants sont parfois aux limites de la légalité. L’âge minimum, quant à lui, est fixé à 14 ans. De plus, cet âge minimum n’est accepté que dans le cadre de la formation professionnelle.

La discrimination et l’égalité de rémunération: Toutes les formes de distinction de race, de couleur, de religion, de sexe, d’opinion politique, de nationalité, etc. qui ont pour effet d’altérer l’égalité des chances sont considérées comme de la discrimination. L’égalité de rémunération entre la main d’œuvre masculine et féminine pour un travail de valeur égale est importante.

Une autre déclaration est la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale (MNE déclaration). Elle vise les relations de travail entre les différentes parties ­prenantes d’un contrat :
  • Le droit à la sécurité de l’emploi
  • Le droit à une rémunération convenable
  • Le droit à des conditions de travail sûres et saines
  • La prise en compte des heures de travail maximum
  • La formation
  • Le traitement des plaintes

Les principes directeurs de l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE)
Les principes directeurs de l’OCDE sont des principes à l’intention des dirigeants de multinationales. Ces principes font partie de la Déclaration de l’OCDE sur les investissements internationaux et les entreprises multinationales:
  • Informer à temps en cas de réorganisation, licenciement collectif ou autres formes de départ
  • Pas de menace de déplacement dans l’exercice du droit d’organisation, c’est-à-dire ne pas déplacer les représentants syndicaux et autres syndiqués
  • Ne pas utiliser de «normes doubles» c’est-à-dire ne pas faire d’actions à deux poids, deux mesures
  • Dans la mesure du possible, employer du personnel local et assurer des formations
  • Permettre aux représentants du personnel de négocier et de concerter les décideurs

Les autres normes et valeurs à orientation humaine
En matière de politique sociale, il existe bien d’autres règlementations comme les droits en matière de santé, définis par le Comité des droits sociaux, économiques et culturels (CDSEC) ou encore les lois régissant la sécurité au travail.

Les normes et valeurs en matière d’environnement
Il existe beaucoup de conventions qui lient certains pays en différents accords dont le plus connu est sans doute le protocole de Kyoto. Pourtant la base, à l’image des Droits de l’Homme, est la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement ainsi que le Traité CE (qui concerne les pays européens). Ces conventions définissent des principes de protection de l’environnement, concernant des domaines aussi vastes que l’air, le climat, la biodiversité, les substances et produits dangereux, etc.

La convention d’Aarhus, quant à elle, réunit les Droits de l’Homme et les droits environnementaux en permettant au public un accès à l’information et à la justice en matière d’environnement.

Les normes et valeurs en matière d’économie
Outre les normes et valeurs en matière de protection des consommateurs décrites dans les Principes directeurs des Nations Unies pour la protection du consommateur  et celles en matière de lutte contre la corruption, fixées par l’OCDE dans la Convention de lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans le cadre de transactions commerciales internationales, il existe des principes directeurs de l’OCDE en matière de bonne gouvernance (dans la Déclaration de l’OCDE sur l’investissement international et les entreprises multinationales).

Ces principes sont des recommandations non contraignantes qui encouragent les entreprises à se conformer aux lois des pays dans lesquels ils résident. Ils regroupent des aspects assez diversifiés :
  • Contribuer aux progrès économiques, sociaux et écologiques dans une optique de développement durable
  • Respecter les droits de l’homme
  • Encourager les compétences locales
  • Ne pas réclamer des exemptions concernant les lois qui entrent dans l’optique du développement durable
  • Soutenir les principes de bonne gestion d’entreprise et les mettre en œuvre concrètement

Les directives de l’ISO 26000

Contrairement aux autres normes ISO qui offre une certification lors de l’application des normes, la norme ISO 26000 ne fournit que des directives que les entreprises ont le loisir de suivre (dans l’idée de démarche volontaire du concept RSE). Cette norme est applicable à tout type d’organisation. C’est pourquoi l’Organisation Internationale de Normalisation (OIN) parle plutôt de responsabilité sociétale (RS) que de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

L’avantage de la norme ISO 26000 c’est qu’elle englobe tous les 3 piliers de la RSE, ce qu’aucune norme internationale ne faisait auparavant.

L’ISO 26000 a été signée en 2008 par beaucoup de pays membres de l’OIN dont la Belgique et la Chine. Seuls 5 pays membres n’ont pas voté leur adhésion: les États-Unis, l’Inde, la Turquie, Cuba et enfin le Luxembourg.




Que définit l’ISO 26000 ?
Les domaines d’application de l’ISO 26000 cernent la RS afin que l’organisation intéressée puisse les consulter avant et pendant son engagement dans la RS. Ces domaines sont les suivants :
  • Les concepts, termes et définitions relatifs à la responsabilité sociétale
  • Les origines, les orientations et les caractéristiques de la RS
  • Les principes et pratiques en matière de RS
  • Les questions centrales et les domaines d’action de la RS
  • L’intégration, la concrétisation, la promotion d’un comportement responsable dans l’ensemble de l’organisation, et à travers ses politiques et pratiques, dans sa sphère d’influence
  • L’identification des parties prenantes et le dialogue avec elles
  • La communication sur les engagements, les performances et autres informations concernant la responsabilité sociétale.

Les 7 questions centrales de l’ISO 26000
L’ISO 26000 définit 7 lignes directrices  qui permettent à l’entreprise d’appréhender de manière concrète la RS:
  • La gouvernance de l’organisation
  • Les droits de l’Homme
  • Relations et conditions de travail
  • L’environnement
  • Loyauté des pratiques
  • Questions relatives aux consommateurs
  • Communauté et développement local

Quelle est la marche à suivre pour s’engager dans l’ISO 26000?
Concrètement, l’entreprise qui s’engage dans la RS, doit tout d’abord prendre conscience de ce qu’implique un tel choix. Elle doit comprendre ce que contient la RSE pour pouvoir en appliquer les règles de manière optimale.
Ensuite, elle doit faire un état des lieux des actions déjà appliquées intentionnellement ou non en son sein. Elle doit aussi identifier ses parties prenantes.
Quand elle est en possession de toutes les données relatives à ses parties prenantes et aux actions déjà entreprises, elle peut sereinement se poser les questions concernant toutes les dimensions de la RS (les questions centrales de l’ISO 26000).
L’entreprise intègre ensuite les dimensions de la RS dans sa politique en n’oubliant pas de communiquer autant en externe qu’en interne les changements à opérer mais aussi les réussites et les points à améliorer.

Les autres normes liées à la RSE

L’ISO 14001 (environnement)
L’ISO 14001 est une des normes les plus utilisées dans la série des normes 14000 concernant le management environnemental. Une entreprise qui s’engage dans l’ISO 14001 s’engage à suivre des exigences telles que: respect de la réglementation en vigueur concernant l’environnement, engagement d’un progrès continu, engagement de prévention de la pollution, etc. Cette norme est soumise à un audit qui aboutit à une certification.

L’ISO 9001 (qualité)
L’ISO 9001 est une norme de management de la qualité. Ce qui signifie que l’entreprise demandant la certification 9001 démontre son aptitude à fournir un produit de qualité par rapport à l’exigence de ses clients et à la réglementation en vigueur, le tout dans une amélioration continue. Tout comme l’ISO14001, cette norme donne droit, après audit, à une certification.

L’OHSAS 18001 (santé/sécurité)
L’OHSAS 18001 est un référentiel reconnu mondialement dans le domaine de la santé et de la sécurité en entreprise attribué par la British Standards Institution (BSI). Les principaux éléments de cette norme sont: la reconnaissance des dangers, l’évaluation et la gestion des risques; préparation aux situations d’urgence et solutions; mesure, suivi et amélioration des performances; etc.

Le label ESR de l’INDR
La Chambre du Commerce Luxembourgeoise a développé son propre label. Contrairement aux directives de l’ISO 26000, le label de l’Institut National du Développement durable et de la Responsabilité sociale (INDR) se base sur un outil de vérification composé de 28 objectifs. Ce label, comme toutes les certifications, est payant.

Le code de conduite SA 8000
La norme SA 8000, créée par la Social Accountability International (SAI) était jusqu’ici la norme internationale la plus suivie en politique sociale. Contrairement à l’ISO 26000, la norme SA 8000 donne une accréditation aux entreprises qui le désirent. Tout comme l’ISO 26 000, cette norme est donnée par un organisme privé.
La norme SA 8000 concerne essentiellement le respect des droits humains et des droits sociaux. Elle s’appuie pour ce faire sur les principes de l’OIT décrits plus haut.
Les entreprises qui adhèrent à cette norme s’engagent, tout comme pour l’ISO 26 000 à:
  • Respecter la législation nationale et leurs obligations contractuelles
  • Respecter les principes de l’OIT, des Droits de l’Homme et des Droits de l’Enfant
  • Se conformer aux exigences de la norme concernant:
    • la main-d’œuvre infantile,
    • la main-d’œuvre forcée,
    • la santé et la sécurité,
    • les libertés syndicales et négociations collectives,
    • la discrimination et la pratique disciplinaire,
    • les heures de travail,
    • la rémunération et le système de management.


Les subventions et les aides

Au niveau européen comme au niveau national ou régional, il existe des aides et des subventions pour aider les entreprises dans leur démarche RSE. ­Notamment:
Programme PROGRESS de l’Union européenne pour l’emploi et la solidarité sociale. Ce programme a été créé pour soutenir financièrement la mise en œuvre de projets dans les domaines de l’emploi, affaires sociales et égalité des chances.
Les Agences-Conseil en économie sociale en partenariat avec la région wallonne qui aide les entreprises voulant s’engager dans la RSE dans des domaines assez variés.


Conclusion

Pour s’engager dans la RSE, il faut que l’entreprise veille avant tout respecter les lois du pays dans ­lequel elle se trouve. Il arrive souvent que les entreprises contournent la loi de manière consciente ou inconsciente. Cependant, il existe de nombreux outils à la disposition des entreprises, tant au niveau légal qu’au niveau des normes et des labels, qui leur permettent de s’engager réellement dans la RSE.
De plus, les gouvernements et organismes officiels, même s’ils ne font pas d’ingérence dans le principe de volontariat de la RSE, mettent à disposition des entreprises beaucoup d’aides sous forme de subventions ou de conseils. Cela permet aux entreprises d’amortir le coût initial de la RSE et de s’engager plus facilement dans le concept.
Dans certains pays développés, des lois obligent les entreprises cotées et non cotées en bourse à inclure dans leur rapport annuel, une partie «sociétale» incluant des critères relatifs aux objectifs sociétaux, environnementaux et de qualité de la gouvernance (telle que la Loi Grenelle en France ou les codes Buysse et Lippens en Belgique).

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